Cuba, si? Histoire vécue
6 mars 2014Il y a quelques jours, un collègue me demande d’évaluer une patiente inquiète après avoir subi un redrapage mammaire à Cuba.
Un fois dans mon bureau, cette sexagénaire explique qu’elle a déjà eu recours à une abdominoplastie à Cuba il y a quelques années. Le tout a été sans complications et lui a procuré un résultat esthétique « correct ». Comme une bonne amie allait à son tour subir une intervention esthétique à Cuba, la patiente a décidé de l’accompagner et d’en profiter pour obtenir cette fois une chirurgie des seins.
Mon interlocutrice m’explique que, quelques jours après l’opération, elle a dû retourner à la clinique pour traiter une infection aux deux seins. Or, le personnel en place n’est pas parvenu, malgré diverses tentatives, à lui administrer le traitement par voie intraveineuse prescrit. Il a donc décidé de lui faire des injections intramusculaires, deux fois par jour pendant 10 jours. Selon la patiente, un liquide jaunâtre s’écoule abondamment de son sein droit durant toute cette période.
Après un séjour de 21 jours, la dame quitte finalement Cuba, même si ses plaies n’ont pas eu le temps de guérir. À son retour, l’infection qui perdure la mène du CLSC aux urgences, si bien que, lasse de réexpliquer son histoire à chaque nouvelle consultation, elle se tourne vers un médecin de famille en pratique privée. Devant son état, ce dernier lui recommande de consulter un spécialiste et la dirige à notre clinique.
Cette patiente que je reçois dans mon cabinet ne parvient à me donner le nom de son chirurgien cubain. Elle me remet la documentation reçue, manifestement traduite de l’espagnol à l’anglais par un logiciel de traduction automatique. C’est absolument incompréhensible. Elle me montre des photos de ses seins infectés qu’elle a prises elle-même à Cuba et d’autres qu’elle a envoyées par courriel à la clinique cubaine. De là-bas, on lui a répondu que tout était normal. Je n’ai accès à aucune autre information, à absolument aucun dossier digne de ce nom et évidemment à aucune photo préopératoire, note de consultation ou recommandation. Son chirurgien cubain savait pourtant qu’elle aurait besoin d’un suivi au Canada.
Malgré ces conditions pas du tout optimales, nous parvenons à traiter ses plaies. Notre intervention a sans doute permis à cette patiente qui avait déjà eu 30 jours d’antibiotiques de ne pas devoir en recevoir à nouveau. Huit jours plus tard, elle nous remercie de l’avoir enfin ramenée à la santé et, surtout, de l’avoir rassurée! Nous lui avons en effet offert quelque chose qu’elle n’avait pas pu obtenir de sa clinique cubaine : une expertise confirmée.
Je suis perplexe…
Cet enchaînement d’événements m’a laissé perplexe. Il s’agissait de la troisième « touriste cubaine » que je voyais en quelques mois. Nous avons tous eu vent d’histoires similaires dans des reportages. Elles sont marquées par un problème récurrent : un taux d’infection élevé. Et que dire de celles dont on n’entend pas parler?
En novembre 2013, une firme offrant de forfaits de tourisme chirurgical à Cuba offrait ses services dans une foire commerciale montréalaise visant les aînés et les préretraités. Certains de ses clients affichent des commentaires élogieux sur Internet. Et quand on y pense, il est vrai qu’il peut être tentant de se payer un voyage à Cuba grâce à l’économie réalisée en confiant son opération à des médecins d’ailleurs…
Mais, lorsqu’on succombe à la tentation, a-t-on d’abord pris le temps de penser aux « mais »? À mes yeux, lapossibilité de communiquer clairement ses attentes à son chirurgien est d’une importance capitale. Je crois aussi que la réputation du chirurgien et de son équipe, comme la qualité des installations (gage de prévention des infections) sont essentielles. Je suis également persuadé qu’un suivi postopératoire impeccable fait partie des règles de l’art. Est-ce que je me trompe?
Les complications sont possibles partout. En fait, tout chirurgien peut avoir à en régler un jour ou l’autre, et sa formation lui a appris à les gérer. Lorsqu’il s’en occupe lui-même, il améliore la qualité de sa pratique. Encore faut-il qu’il suive ses propres patients… Qu’en est-il du professionnalisme de celui qui ne le fait pas une fois l’opération terminée?
Au Québec, vous avez accès à une information juste et éclairée sur l’intervention et ses risques inhérents. Vous signez un consentement dans votre langue. Et en cas de pépin, vous avez des recours. J’ai la ferme conviction que ce processus est gage d’une médecine de qualité.
Un risque à prendre?
Personnellement, je suis fier de ma formation et des efforts déployés pour faire d’ISOMED un établissement chirurgical agréé par un organisme dûment reconnu par les pairs et les autorités.
Je considère important d’accompagner et de rassurer les patientes tout au long de leur récupération qui s’étale sur plusieurs mois. Je trouve d’ailleurs une grande récompense à les suivre et à constater que j’ai apporté quelque chose de positif dans leur vie.
Certes, la sécurité a un prix. La non-sécurité, aussi. En tourisme chirurgical, l’apparence d’aubaine constitue un appât efficace. Mais pensez-y : une agence de voyages est-elle le conseiller idéal pour organiser une intervention chirurgicale? Nous avons tous vécu des situations où il n’a pas été payant de ne considérer que le prix. Même pour un simple voyage… Sauf qu’il s’agit ici de votre santé.
La santé n’a pas de prix. Je ne ferai pas de compromis sur la sécurité et le suivi des personnes qui me consultent. Je continuerai à travailler pour que la différence en vaille le prix.
Je vous invite très amicalement à partager cette conviction.
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Depuis environ 15 ans, je suis un fidèle assistant du « Symposium annuel de la chirurgie du Sein » (Toronto Breast Surgery Symposium) tenu chaque printemps à Toronto. J’assiste à ce congrès pour atteindre divers objectifs :
1. Pour y apprendre quelque chose de nouveau, susceptible de modifier nos façons de faire;
2. Pour valider que ma pratique de la chirurgie du sein est adéquate, à jour, et tient bien compte des données les plus récentes, au bénéfice de mes patient(e)s;
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