Retrait d’implants mammaires – Capsulectomie En Bloc et totale
4 mai 2023Beaucoup d’hommes et de femmes souffrent de symptômes douloureux, de malaises divers et pour lesquels l’investigation médicale s’avère, encore en 2023, incapable d’identifier un diagnostic certain. On peut alors leur poser des diagnostics divers : fibromyalgie, maladie de Lyme, troubles de l’anxiété, du comportement, ou pire, de la personnalité (plaignards, simulateurs, …).
Certains ont également des maladies chroniques démontrables (Sclérose en plaque, Arthrite Rhumatoïde, ... ) pour lesquelles la cause n’est pas facilement démontrable et le traitement pas toujours efficace.
Devant le succès mitigé de la médecine chez plusieurs de ces patients, leurs recherches peuvent les mener à se voir offrir toutes sortes de traitements, dont l’efficacité est incertaine. De plus, nous sommes en 2023 et les médias sociaux peuvent jouer un rôle dans leurs démarches. Il y a de fortes chances qu’on identifie quelqu’un qui veuille venir à leur secours, leur offre une telle cure. Je ne peux que rappeler le traitement de la sclérose en plaques par une microchirurgie des canaux lymphatiques du cou, réalisée en Italie ( https://www.statnews.com/2017/11/28/multiple-sclerosis-paolo-zamboni/ )
Les patientes porteuses d’implants mammaires ne sont pas à l’abri de ces problèmes. Considérant ce qui précède, elles pourront impliquer leurs implants la responsabilité de leurs malaises ou maladies. Elles trouveront des forums pour confirmer leurs craintes et identifieront certains médecins qui proposent des traitements, parfois très agressifs : une chirurgie radicale d’exérèse des deux implants, de leur capsule et même d’une partie du muscle pectoral, un rasage des côtes et des muscles intercostaux.
La Dre Patricia McGuire ( https://www.parkcrestplasticsurgery.com/plastic-surgeon-st-louis-dr-mcguire/ ) a procédé à un travail de moine, très extensif et très documenté sur cette population de patients et sur le type d’intervention qui seraient appropriées ou inappropriées pour ces patientes. Elle a présenté ses résultats au congrès de la chirurgie du sein à Toronto en avril 2023. ( https://www.torontoaestheticmeeting.ca/toronto-breast-symposium/faculty/ )
Voici les conclusions des études de la Dre McGuire :
1. Les symptômes des patientes ne doivent pas être remis en question. Ils sont bien réels.
2. À partir d’une multitude de tests, chez les patientes souffrantes avec ou sans implants, il n’a pas été possible d’identifier la présence de quelque traceur qui puisse distinguer les porteuses des non porteuses d’implants, pour des âges comparables, ethnies comparables, etc.
3. À ce jour, aucune maladie ne semble pouvoir être liée au silicone lui-même de façon démontrable.
4. Les patientes qui ont vu leurs implants retirés chirurgicalement, ont été divisées en 3 groupes
a) celles à qui on a enlevé les implants, sans plus.b) celles à qui on a enlevé les implants et leur capsule, sans chercher à être radical.
c) celles à qui on a enlevé les implants et la capsule de façon radicale, y compris des marges en tissus sain (muscle, glande mammaire, rasage cage thoracique, cautérisation, …)
L’évolution post opératoire de ces trois groupes de patientes, traitées différemment mais pour des problèmes similaires, a montré que :
- Environ 50% des patientes ont initialement vu leurs symptômes régresser.
-À un an, environ 25% des patientes opérées demeuraient améliorées. 75% ne l’étaient pas.
- Mais plus important encore :
Il n’y avait aucune différence dans le succès des trois différentes approches chirurgicales, simple ou agressive.
Cette étude tente à démontrer qu’il n’y a pas d’indication de procéder à une intervention radicale.
Ma propre expérience :
J’ai vu en consultation moi-même quelques patientes de cette population. J’ai bien écouté ces patientes, leurs symptômes, leur craintes, leurs attentes. Les symptômes des patientes ne doivent pas être remis en question. Ils sont bien réels.
J’ai refusé de procéder à l’approche radicale car je ne pouvais y trouver une justification rationnelle. J’ai beau lire ce que d’autres chirurgiens proposent, je ne suis pas convaincu par leurs explications.
J’ai expliqué ma réflexion aux patientes, au meilleur de ma connaissance. Chez celles qui ont accepté ces explications, j’ai procédé à une explantation et à l’exérèse de toute la capsule fibreuse que je pouvais identifier, sans aller jusqu’à mutiler indûment les tissus vivants de la patiente. Il s’agit d’une approche que j’applique aussi depuis des années à toutes les patientes qui consultent pour des capsules fibreuses inconfortables mais sans symptômes systémiques hors des seins. À ce jour, je peux à ce jour recenser 176 de ces derniers cas dans ma pratique.
Ma courte expérience avec les patients ayant des symptômes systémiques, a mené aux résultats suivants :
- Pas de complication;
-Un résultat esthétique très satisfaisant pour les patientes et aussi de mon propre point de vue;
- Des changements importants au niveau des symptômes au niveau des seins surtout chez les patientes qui avaient aussi des capsules fibreuses (des seins durs).
- Peu de changement au niveau des symptômes hors des seins, après 3 mois.
- MAIS 100% des patientes étaient satisfaites et fières d’être allées de l’avant.
Je crois comprendre que ces résultats s’expliquent par le fait que les patientes ont voulu mettre toutes les chances de leur côté. Elles ont voulu s’assurer qu’elles avaient fait tout ce qui était possible pour améliorer leurs symptômes, même si la conduite retenue faisait controverse.
Au point de vue de la satisfaction du résultat esthétique, je crois avoir observé que leurs attentes s’étaient ajustées au cours des années. Leur estime de soi, le rôle des implants dans leur image corporelle, n’étaient plus les mêmes et la balance a oscillé vers le retrait de leurs implants.
J’ai été prêt à contribuer à cet effort et à les assister, mais pas au prix d’une intervention inutile et présentant des risques plus élevés.
Aujourd’hui, les recherches de la Dre Patricia McGuire semblent bien confirmer que cette conduite est toujours adéquate.
Je ne pratiquerai donc pas de chirurgie d’explantation radicale chez les patientes de cette population.
Je ne suis pas détenteur de la vérité absolue. Je me remets sans cesse en doute. Mais après 30 années de pratique, je crois qu’il est tout de même temps que j’aie quelques opinions. Il est certain que cette expérience, peut aussi me mener à analyser ce que je lis ou entends d’une façon pondérée. Considérant tout ça, le but de ce blogue est d’abord de vous informer, au meilleur de ma connaissance.
JPD
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L'usage de ces implants texturés a été très limité et ces derniers n'ont pas été associés au LAGC-AIM.
Il m'est impossible avec ce nombre réduit de tirer des statistiques.
Néanmoins, ces implants représentent dans ma série de patients, 2.5% de ces ruptures d'implants.
Il n'y a pas lieu de rechercher d'emblée des séromes ou des masses suggestives de lymphome associé aux implants mammaires mais l'échographie demeure sans doute d'examen de choix pour évaluer l'intégrité de ces implants.
Une mammographie de dépistage est aussi requise pour les patientes de plus de 40 ans ou plus jeunes, si elles ont une histoire personnelle ou familiale de cancer du sein. Rappelons que le but de la mammographie est de dépister une lésion de la glande mammaire et non pas d'évaluer l'implant lui-même. C'est aussi de la médecine rigoureuse d'évaluer glande et implant avec ces deux mesures pour avoir un diagnostic complet .
Groupe II: Remplacement des implants mammaire "Vintage"
24 09 2024
Il s'agit d'implants, en général, de silicone liquide, datant d'avant 1992. Puisqu'ils sont toujours en place, ces implants datent de plus de 30 ans.
Ils représentent 25% des implants rompus que j'ai opérés.
Les patientes consultent très tard (30 à 42 ans), car leurs seins ne sont plus leur priorité. Elles ont des limitations financières, ou de santé... . Elles me consultent souvent pour autre chose (visage, paupières), qui est alors, devenu pus prioritaire...
Ces implants peuvent être considérés comme rompus dans l'ensemble.
Il y a rarement d'investigation à faire. Les capsules de ces implants sont souvent calcifiées ce qui rend le bilan radiologique des seins eux-mêmes quasi impossible.
Essentiellement tous ces implants demandent qu'on enlève chirurgicalement silicone et capsules fibreuses, qu'on reconstruise une cavité, qu'on mette des implants modernes de gel de silicone, ou qu'on ne remette simplement plus rien.
Un redrapage, seul, n'est en général pas possible car il n'y a plus de glande mammaire.
Les implants sont souvent devant le muscle ce dernier s'est atrophié depuis des années.
Une reconstruction par derme artificiel ("Alloderm tm) peut être discutée mais est couteuse et associée à davantage de complications, une convalescence plus complexe et plus longue. Elle est rarement retenue comme solution. Des techniques qui s'apparentent à "la brassière interne" sont souvent requises bien que personnellement, j'ai toujours nommées ces techniques comme étant des "capsuloraphies".
C'est dans ce groupe qu'il est le plus fréquent de ne pas remplacer les implants. Une solution de "compromis" est souvent acceptée.
Je souhaiterais (recommande) qu'aucune patiente portant encore ces implants, ne les garde, si leur santé permet une intervention chirurgicale pour les retirer, les remplacer si possible.
Elles devraient au plus tôt obtenir une opinion d'un chirurgien en qui elles pourraient accorder leur confiance.